29 novembre 2009

Grigore Alexandrescu - Lever de lune A Tismana

Comme en cette belle nuit, où la lune d’un rayon pâle.
Sur le front de mon amante de vives ombres animait,
Jamais d’un si beau paysage, mes yeux n’avaient vu l’égal
Ni de lune aussi charmante, de ma vie je n’admirais.

Tout d’abord comme une étoile, comme une chandelle qu’au loin
Le voyageur seul allume pour le désert égayer,
A travers d’épais branchages de la forêt de sapins,
Parmi les feuilles mouvantes, je la vis étinceler.

Puis, comme ses rayons obliques un pan de mur font surgir
Qui sur la crête se dresse, demeure triste, inhabitée,
Cette ruine elle caresse d’un livide et vague sourire,
Comme un rêve qui se glisse dans une âme ravagée.

Puis, globe de rubis, qui prête vie à cette nuit obscure,
En montant, tout autour d’elle, d’épaisses ombres elle écarte,
A la pointe de gros chênes, pyramides de verdure,
Elle s’arrête, son regard pâle sur le monde elle projette,

Elle éclaire de profonds gouffres. Le vieux monastère là-haut,
Forteresse féodale que ses tours et grands créneaux
Sous la lune font paraître, en y regardant de loin,
Quelque vieux et légendaire château écossais d’Ossian,

Où les génies et fantômes avec violence se heurtent;
Et le désert sans limites et le sentier égaré,
Le rocher, la grotte profonde, habitée aux temps passés
Par un saint ermite du lieu, qu’adorent les malheureux.

Combien douces m’étaient ces heures d’extase et de réflexion:
Ces murmures, ces chuchotements qui prônent vie dans le désert,
Le silence profond des tombes qui régnait au monastère,
Lieu de tumulte naguère et de politiques tourbillons.

La nuit, tout, à cette scène donnait une colossale grandeur,
Et deux instincts des plus nobles avec force elle éveillait:
L’un la foi au ciel, et l’autre, pour la patrie l’ardeur,
Qui jadis sur ce même site les ancêtres animait.

Nos montagnes souvent furent cher asile des libertés,
Et de leurs sommets naguère pareils à de vifs torrents,
Les Roumains sur les Barbares tant de fois se sont jetés,
Que ceux-ci venus en lions, s’en allaient en cerfs au sang.

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